" [Et] si nous savourions une tasse de thé? La lumière de l'après-midi éclaire les bambous, l'eau des fontaines gazouille avec délice, le soupir des pins chuchote dans le goudron de fonte. Rêvons d'évanescence et abandonnons-nous à la folle beauté des choses. "


Kakuzô OKAKURA, in Le Livre du thé, 2006 (1906).


Kabuse N° 1, début mai, Japon

21/07/2009
 
 
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N'ayant pas de kyusu pour préparer ce thé vert, j'ai utilisé un zhong en porcelaine contenant 10 cl, une petite carafe de refroidissement en verre et une passoire à la maille bien serrée. Je me suis servie d'une tasse large et peu profonde aux parois fines, contenant également 10 cl.


Pour cette dégustation, j'ai infusé 3 g de thé dans 10 cl d'eau filtrée (Brita), chauffée à 65°C. L'infusion a été renouvelée trois fois, la première ayant duré 60'', la deuxième 25'' et la troisième 30''. 




La première tasse m'a offert une liqueur très épaisse et très onctueuse, me rappelant la texture argileuse de certains matcha. Des notes soutenues de légumes verts cuits (épinards, artichaut, asperges vertes) étaient portées par une toute légère amertume, sans qu'il n'y ait d'astringence. Ensuite, j'ai perçu une saveur légèrement sucrée me rappelant celle du lait en poudre (la même que j'ai retrouvée dans certains matcha) et enfin, une note de pamplemousse jaune.

Celle-ci et la note de lait en poudre étaient persistantes sur un fond sucré.


La deuxième tasse m'a offert une liqueur toujours épaisse mais davantage argileuse. Les notes de légumes cuits (épinards, asperges vertes, endives) sont devenues encore plus soutenues, accentuées par une amertume plus intense qui s'est estompée néanmoins assez vite pour donner place à des notes zestées.




Enfin, la troisième tasse m'a offert une liqueur moins épaisse mais très onctueuse. J'ai retrouvé en premier les notes de légumes cuits, portées cette fois par une amertume intense mais bien répartie. Après, j'ai été surprise par une forte note de poisson blanc cru qui apportait une grande fraîcheur à la liqueur. En dernier, j'ai retrouvé des notes zestées (pamplemousse et nectarine) qui se sont avérées être très longues en bouche.


Et alors, tout à la fin, j'ai admiré longuement ce que je voyais au fond de la troisième tasse. Une représentation possible de La Voie du Thé?




Quel plaisir de découvrir ce thé en écoutant le Concerto n° 2 de Haydn avec Mstislav Rostropovich au violoncelle! Pour boucler cette dégustation avec légèreté, j'ai eu envie de relire "Elévation" de Charles Beaudelaire. En voici un extrait car ce poème est vraiment beau...


Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées, 

Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,

Par delà le soleil, par delà les éthers,

Par delà les confins des sphères étoilées,


Mon esprit, tu te meus avec agilité,

Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,

Tu sillonnes gaiement l'immensité profonde

Avec une indicible et mâle volupté.


Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides;

Va te purifier dans l'air supérieur,

Et bois, comme une pure et divine liqueur,

Le feu clair qui remplit les espaces limpides.

(...) in Les Fleurs du mal, 1857.


 
 
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